Un processus de paix?

9 octobre 2013

Un processus de paix?

crédit-photo-lanavedeambula

Lorsqu’on vient en Colombie on a forcément une multitude de questions au sujet du conflit qui a rendu ce pays tristement célébre. Tout est tellement flou à ce sujet, aprés 1 an et demie dans ce pays je dois avouer que je n’ai pas réussi à faire le point sur beaucoup de mes questionnements. Les Colombiens n’aiment pas beaucoup en parler, surtout que les régions que l’on cotoie comme étranger n’ont pas ou peu connu le conflit de près.

Le conflit a commencé suite à une série de violence engendrées par le meurtre de Jorge Eliecer Gaitan, un politique populaire en passe d’être Président dans les années 50. Un groupe de campesinos décide alors de prendre les armes afin de réclamer une réforme agraire de fond puis au fur et à mesure ils se joindront à l’idéologie communiste.

Ensuite, face à la réalité du coût de la guerre, la guerilla se lance dans le commerce de la drogue afin de pourvoir à ses besoins.

Voilà un bref résumé de ce que je sais. Mais entre l’idéologie et l’envie d’une société meilleure qui les a ammené à prendre les armes et le trafic de drogue il y a un grand pas et c’est là que je me perds. Où est l’idéologie de la guerilla, qu’en est-il de cette utopie, de ce désir ? Dans les médias, on parle régulièrement de la violence engendrée par la guerrilla mais jamais de ses revendications politiques, auraient-elles totalement disparues ?

Autour de moi, tous ceux à qui j’ai demandé (de divers idéaux politiques) me disent qu’ils ne croient pas à un engagement politique de la part de la guerilla. Du moins pas depuis les années 80. Des massacres de civils ont été perpétrés par celle-ci et elle a fait beaucoup de pressions pour récupérer des terres sur des paysans etc. Une guerilla par définition a un statut politique à travers sa résistance face à un système établit et se distingue du crime organisé car elle se bat pour le peuple et ne s’attaque donc pas à lui. Peut-on alors continuer d’appeler l’ELN et les FARC-EP des guerillas ? Aprés tout, participer au commerce de la drogue n’est-il pas participer d’une certaine façon à un système établit ? S’attaquer au peuple que l’on prétend défendre n’est-ce pas contradictoire ?

Quelqu’un m’expliquait que l’un des principal problème c’est que la guerilla ne vient pas d’un mouvement de masse mais plutôt d’un groupe isolé qui n’a jamais vraiment eu d’appui en grande quantité dans le pays. C’est d’ailleurs sûrement pour cela qu’il y a eu un enlisement aussi fort dans le conflit. Une grande organisation de force qui a su s’imposer dans des régions où il y avait pas ou peu d’alternative car il n’y avait pas d’institutions publiques et où sous la menace il fallait joindre le groupe armé ou partir.

La Colombie a connu beaucoup de guerillas, le M-19, par exemple, a su rendre les armes avant de s’envenimer dans une situation qu’ils ne n’auraient pas pu gérer. Alors que d’autres ce sont laissés emporter dans un engrenage qui a causé plus de préjudice que de résultat positif politique. Je comprends qu’il faille rentrer en guerre contre un système qui n’est pas juste, comme l’est celui de la Colombie, mais la lutte devient-elle légitime lorsqu’elle génère des milliers de morts et des millions de déplacés ?

Cela a permis au pays avec l’appui des Etats-Unis de s’armer, le budjet principal de l’Etat est le budjet militaire…

Je me demande réellement si la guerilla s’acharne seulement pour le commerce fructueux de la drogue comme laisse l’entendre tous les médias. Ou peut-être est-ce le goût amer du pouvoir qui incite à continuer la guerre.

Aujourd’hui, tout cela est remis en question à La Havane où est en cours le processus de paix depuis des mois.

Mais aprés 50 ans de conflit les Colombiens y croient tout autant qu’un Palestinien croit a un engagement Israelien contre la colonisation.

Un éléve m’a dit « C’est en négociant la paix qu’ils se préparent à mieux faire la guerre »

Cette phrase m’a trotté dans la tête pendant un moment.

Car en y pensant bien, lorsqu’il y a une lutte pour le pouvoir comment trouver un arrangement à l’amiable ? Quelles sont les concessions que chacun est prêt à faire ?

Le noyau dur du processus de paix, en train de se négocier, est la réforme agraire qui est à l’origine du conflit. La Colombie est considéré comme l’un des pays les plus inégalitaire dans la distribution de ses terres. Il est donc grand temps d’y remédier. La guerilla exige un accord de paix basé sur celle-ci. Il s’agit donc d’un espoir pour un pays majoritairement agricole. Mais est-ce encore applicable à l’heure où la Colombie a cédé des concessions minières à travers tout le pays, où depuis un an un accord de libre échange avec les Etats-Unis interdit l’échange de semance et privilégie les grand producteurs afin d’exporter leurs produits en grande quantité vers les Etats-Unis (le TLC). On lit que dans les accords est évoquée la sécurité alimentaire du pays afin de remédier à la crise alimentaire et permettre une meilleure répartition des richesses1. Des accords agraires oui mais sont-ils encore réalisables ? Car une chose est sure l’Etat n’est pas prêt à abandonner les concessions minières ni à faire des concessions dans les régions pétrolières (régions très conflictives).

Alors que se négocie la paix, les violences continuent, les paramilitaires qui défendent les grands propriétaires terriens n’ont pas été invité à signer et de chaque partie la guerre est toujours en cours car un cesser le feu n’a pas été autorisé.

 

Il est difficile de comprendre et de savoir à quoi on peut croire quand on ne sait pas réellement l’intêret de certains. Ce qui est sur c’est qu’il y a beaucoup d’enjeux, la Colombie est comme on le sait un pays riche en mineraie, eau, oxygène. Il est aprés tout le pays de la légende de l’El dorado. La paix est-elle possible dans un conflit de pouvoir et d’intérêt?

1 https://periodismohumano.com/en-conflicto/gobierno-y-guerrilla-de-colombia-logran-26-acuerdos-en-materia-agraria.html

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